« Faire République » ensemble
L’ assassinat de Samuel Paty nous plonge toutes et tous dans les affres de l’épouvante et de la consternation. S’arroger le droit de disposer d’une vie au nom d’une vision obscurantiste de la religion est un acte d’horreur qui échappe au fondement même de l’Humanité. Il nous tient alors à cœur d’exprimer avant toutes choses nos sincères condoléances à la famille et aux proches du professeur, à ses collègues et ses élèves.
En s’en prenant à un enseignant, le terroriste s’est attaqué à l’école et plus précisément à l’enseignement des principes de la laïcité, garants de la liberté de conscience qui nous permet de « faire République » ensemble. Aussi, en arrachant la vie de Samuel Paty, son meurtrier insulte et salit la religion dont il se réclame, l’Islam.
Mais, malgré la stupeur et l’effroi, il nous faudra réfléchir demain à l’ensemble des facteurs qui ont rendu possible ce drame.Il s’agit là d’une étape indispensable pour venir à bout de cette barbarie.
L’assassin de Samuel Paty est un jeune homme de 18 ans. Il a grandi et construit son rapport au monde en France. Comment a-t-il pu se laisser convaincre par des discours obscurantistes ? Comment cette aliénation peut-elle l’amener à se rendre coupable d’un acte de cruauté ? Voilà les questions qu’il nous faudra affronter, au-delà de la douleur et du recueillement.
C’est dans ce contexte que le Ministre de l’intérieur a décidé de « faire passer un message » en engageant des perquisitions, parfois même aux domiciles de personnes sans lien avec l’assassinat du professeur, de l’aveu du gouvernement. Des acteurs de la société civile et l’observatoire de la laïcité sont également visés. Il va sans dire que cette « riposte » dépasse les cadres de nos lois et de l’état de droit. Nous ne pouvons que nous en inquiéter.
D’autres entendent profiter du choc entraîné par le meurtre de Samuel Paty pour imposer leurs convictions et désigner des coupables.
Dès lors, il est coutume d’entendre des responsables et commentateurs politiques défendre une laïcité dénaturée, dont l’objectif n’est plus de garantir à chacun le droit de croire ou pas, mais de stigmatiser et restreindre les libertés publiques, et notamment celles des musulmans.
En conséquence, tous ceux qui sont attachés à l’essence même de la loi de 1905 sont accusés d’accointance avec les terroristes.
Les débats récents autour du communautarisme supposé d’une partie de la population entretiennent le mythe d’un ennemi intérieur en France. Des bidonvilles aux grands ensembles, génération après génération, les habitants de ces quartiers n’ont pas choisi de s’y installer et sont d’ailleurs les premiers à déplorer le manque de mixité sociale et la disparition des services publics.
Ces discours s’apparentent à une série de préjugés trop souvent entendus, qui viennent alimenter une stratégie de la tension, dont nous souffrons, au final, toutes et tous. Pire encore, ils participent à accroître les discriminations et l’islamophobie. A ce sujet, mercredi 21 octobre, lors de la cérémonie organisée par la ville en hommage à Samuel Paty, des internautes ont remis en cause la légitimité de la présence d’une conseillère municipale portant le voile. Nous dénonçons avec force ces invectives.
A Ivry, nous avons fait un choix de longue date, celui de combattre tous les discours de division, partout où ils se nichent, qu’ils soient d’ordre religieux ou politiques.
Nous savons bien que l’amélioration de nos conditions de vie suppose l’union de toutes et tous, et que dès lors que nous sommes séparés, plane alors sur nos quotidiens l’ombre de la régression sociale et des conflits.
Nous œuvrons chaque jour à maintenir le haut niveau de nos politiques éducatives, culturelles et sportives. Veiller à ce que chaque enfant, peu importe son origine sociale, puisse étudier dans de bonnes conditions et pratiquer une activité extra-scolaire, c’est prévenir l’exclusion sociale.
Ici, chacun connait la richesse du métissage et participe à faire vivre la solidarité, patrimoine de notre belle cité populaire. Respecter nos différences et se concentrer sur tout ce qui nous rassemble, voici une manière de « faire ville » ensemble et construire une société où tout le monde trouve sa place.